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Monsieur le Conseiller d’Etat,

En cette rentrée scolaire et politique, votre Département se démarque par la crainte d’une possible dérive propagandiste lors de débats contradictoires, pourtant soigneusement cadrés par des professionnel·les de l’éducation. 

Cette position constitue une rupture avec une pratique bien rôdée depuis des années dans le canton de Vaud – et assez largement répandue et encouragée dans le pays. Les élèves ont en effet le droit de recevoir une formation rigoureuse sur la vie politique et d’accéder au débat. Les enseignant·es ont le devoir de les accompagner et de les former à ce travail. 

Une telle fermeté de votre part tranche avec la facilité avec laquelle un certain prosélytisme s’insinue dans l’institution scolaire, entre autres lieux de travail de l’Etat de Vaud.

Il a en effet fallu que des enseignant·es de gymnase tirent la sonnette d’alarme à l’interne de leur établissement, alertent le syndicat SUD et mandatent Rhizome (télécharger le rapport)- un organisme spécialisé en questions religieuses et idéologiques – pour que se pose la question du maintien d’une intervention de la fondation Eurasia dans un gymnase vaudois. 

La direction de l’établissement a finalement annulé la prestation de l’Eurasia Learning Institute for Happiness and Wellbeing (ELI) et reconfiguré le programme de la journée concernée qui n’est pas moins qu’une journée pédagogique, à savoir une conférence et des ateliers, le tout de caractère obligatoire pour toutes et tous les enseignant·es du gymnase. 

La proximité des deux situations nous fait poser la question suivante dont nous assumons la dimension polémique :

En cette rentrée, est-il question de dire vouloir protéger les élèves pour mieux donner les enseignant·es en pâture ?

En pâture, d’abord, à toutes celles et ceux qui ne manquent jamais une occasion d’évoquer le spectre de l’enseignant·e mu·e par un viscéral besoin d’endoctriner les générations montantes. Les décisions politiques d’un employeur public ignorant ou malveillant sont alors toujours une aubaine. 

En pâture, ensuite, à tous les gourous plus ou moins à la mode : New Age / apôtres du développement personnel / adeptes de la « reconnexion à soi », de l’approche « holistique » ou autre inspiration anthroposophique. 

Nous défendons la garantie de la liberté pédagogique et revendiquons des compétences renforcées pour les conférences des maître·sses en matière de choix des orientations pédagogiques des établissements publics. Quant à ce qui relève de la religion ou de la spiritualité, cela doit rester d’ordre privé. 

Alors que la profession fait face à une rentrée remplie de défis pédagogiques dont nous ne vous ferons pas l’injure de la longue liste, nous vous remercions de bien vouloir nous donner des éléments de réponse à une interrogation dont nous nous serions bien passé·es.

Dans cette attente, nous vous assurons, Monsieur le Conseiller d’Etat, de notre considération.

Pour SUD Education
Gilles Pierrehumbert, président du SVES-SUD
Stéphane Delaporte, membre du comité du SVMEP-SUD
Françoise Emmanuelle Nicolet, présidente de l’AVMG-SUD

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