La DGEP (Direction générale de l’enseignement postobligatoire) a envoyé un courrier spécifique aux enseignant.e.s des huit établissements du secondaire II qui ont subi des alertes à la bombe. Il demande aux enseignant.e.s d’informer les élèves des risques auxquels s’exposent les personnes qui commettent de tels actes: pas de problème. Par contre, le courrier décline de nouvelles mesures à adopter dans les écoles, mesures qui sont à la fois irréalistes et vexatoires.

Ce courrier nous a surpris.es, car nous n’avons même pas été informé.e.s de la mise en place de ces nouvelles mesures, ce qui démontre encore une fois la volonté de la DGEP de se passer des organisations professionnelles et syndicales. Très vite, ces mesures se sont révélées totalement déconnectées de la réalité du terrain, donc du travail quotidien avec les élèves. Ce qui a suscité de nombreuses réactions de la part de nos collègues.

Au rang des mesures qui mettent le plus mal à l’aise, il y a d’abord la tenue d’un registre systématique des élèves qui sortent de leurs classes pendant les cours avec indication précise de l’heure de sortie et de retour mais aussi l’obligation de garder en classe les élèves durant les pauses de 5 minutes, ce qui requiert la plupart du temps au moins le don d’ubiquité. La tenue de ce registre – dont l’efficacité ne nous convainc pas – alimente la suspicion générale; tout.e élève qui sort dans les couloirs est un.e potentiel suspect.e. Cela ne va pas améliorer l’atmosphère dans nos salles de classes. La Direction générale est-elle si déconnectée du terrain que cela ne la préoccupe pas? Alors même qu’il ne se passe pas un jour sans qu’une enquête rappelle l’état de désarroi que génère la pandémie sur les 15-24 ans en particulier? pas un jour sans que les personnels des écoles ne souffrent à des titres divers des injonctions contradictoires auxquelles on les expose?

De plus, durant les pauses de 5 minutes, les élèves ne peuvent plus se rendre aux toilettes, dont la moitié ont de surcroît été fermées. Cette fermeture d’un bloc de WC sur deux complique le respect de l’hygiène de base et des normes sanitaires, notamment l’hygiène des mains, normes que les profs doivent également faire respecter. Limiter la liberté de mouvement de toutes et tous les élèves, et par effet de bord celle des profs, n’est pas anodin, surtout qu’elle est déjà fortement réduite par la pandémie. La lettre de la DGEP ne le mentionne même pas.

Il ne saurait revenir aux enseignant.e.s de justifier face aux élèves ces nouvelles mesures imposées sans la moindre concertation. Nos élèves ne sont plus des enfants que l’on surveille dans les cours de récréation pour éviter qu’ils ou elles fassent des bêtises ; la plupart de nos élèves sont mêmes majeur.e.s.

Alors que la pression est d’ores et déjà maximale sur toutes et tous, nous dénonçons des mesures qui relèvent – une fois de plus – davantage de la communication que de la politique réelle. Nous voilà poussé.e.s à le redire: le fondement du métier d’enseignant.e, c’est d’enseigner. Nous interviendrons de manière ferme si des reproches sont faits à un.e enseignant.e qui n’aurait pas réussi à se conformer aux «attitudes et bons réflexes» listés dans le courrier de la DGEP.

Nous aussi, nous voulons que les alertes à la bombe cessent, mais nous exigeons de ne plus être tenu.e.s à l’écart quand il faut prendre des mesures – aussi graves et urgentes soient-elles – qui touchent notre quotidien au travail. C’est d’ailleurs la condition nécessaire pour qu’elles aient une chance d’être efficaces.

Lausanne, le 26 avril 2021

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